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Effet des manipulations cervicales sur les artères vertébrales et sur l’hémodynamique cérébrale chez des patients présentant des douleurs cervicales chroniques : un essai clinique contrôlé croisé

Titre original :

Effect of cervical manipulation on vertebral artery and cerebral heamodynamics in patients with chronic neck pain: a crossover randomised controlled trial

Auteurs:

Moser, N., Silvano, M., Noseworthy, M., Côté, P., Wells, G., Behr, M. and Triano, J.

Réréfence

BMJ Open 2019; 9: e025219.

 

Introduction :

La cervicalgie peut causer différents niveaux d’incapacité pour la personne qui en souffre et elle constitue une raison fréquente de consultation en chiropratique (1-5). Malgré l’avancée des recherches, une controverse persiste quant aux effets des manipulations cervicales sur le flux sanguin dans le cerveau et dans les artères vertébrales. Un nombre restreint de rapports de cas suggèrent que les manipulations cervicales pourraient accroître le risque d’accident vasculaire cérébral [6,8]. Par contre, les études épidémiologiques ne supportent pas cette hypothèse [9,10]. Cette étude a pour objectif de déterminer si les manipulations cervicales sont associées à un changement hémodynamique vasculaire cérébrale en comparaison avec une position neutre ou une rotation cervicale maximale chez les patients avec douleur chronique.

 

Méthodologie :

Il s’agit d’un essai clinique croisé randomisé, c’est-à-dire une étude dans laquelle les sujets sont leur propre témoin. Chaque sujet recevait les traitements de manipulation cervicale et une rotation maximale selon une séquence préalablement randomisée. Pour être admissibles à l’étude, les participants devaient être âgés de 18 ans ou plus, souffrir de douleurs cervicales chroniques (d’une durée de 3 mois ou plus) de grade I ou II[1]. Les principaux résultats évalués étaient le flux sanguin (en ml ⁄ s), la vélocité sanguine (en cm ⁄ s) dans les artères vertébrales controlatérales et ipsilatérales ainsi que le niveau de perfusion du cerveau et du cervelet (en mL ⁄ 100 g de tissu).  Les mesures ont été effectuées par imagerie par résonnance magnétique (IRM) en contraste de phase. Pour chaque sujet, les mesures ont d’abord été prises en position neutre et à la suite de chacune des procédures (manipulations cervicales et rotation maximale du cou). Les rotations cervicales maximales étaient réalisées en direction opposée du côté des symptômes cliniques et étaient maintenues pendant une minute. Les manipulations cervicales étaient effectuées par un chiropraticien d’expérience.

 

Résultats :

Au total, 20 participants ont été inclus dans l’étude. L’âge moyen des participants était de 32 ans (± 12,5 ans), la durée moyenne des symptômes était de 5,3 ans (± 5.7 ans) et l’intensité moyenne de la douleur ressentie était en moyenne de 5 ⁄ 10. Comparativement aux mesures obtenues à la position neutre, une différence significative a été observée pour la mesure du flux sanguin controlatérale à la suite d’une rotation cervicale maximale (0,26 ml ⁄ min, IC 95%: 0,11 – 0,41). Une différence significative a aussi été mesurée pour la vélocité de l’artère vertébrale controlatérale à la suite d’une rotation maximale ou à la suite d’une manipulation cervicale (1,18 ml ⁄ min, IC 95% 0,77 – 1,59 et 1,15 ml ⁄ min, IC 95% 0,4 à 1,9, respectivement). Une différence a aussi été observée pour le flux sanguin dans l’artère vertébrale controlatérale à la suite d’une rotation maximale du cou comparativement aux manipulations cervicales (0,23, IC 95%: 0,4 à 1,9). Aucune différence significative n’a été observée dans les mesures hémodynamiques cérébrales et cérébellaires à la suite d’une rotation cervicale maximale ou à la suite de manipulations cervicales comparativement à la position neutre. Une différence significative dans la connectivité fonctionnelle au cervelet à la suite des manipulations cervicale a aussi été observée (p < 0,05). Aucun évènement indésirable important n’a été rapporté.

 

 

Conclusion:

Les résultats de cette étude suggèrent que la rotation maximale cervicale produit une baisse significative du flux sanguin et de la vélocité sanguine de l’artère vertébrale controlatérale. Ces résultats sont en accord avec d’autres études publiées. Les changements observés dans l’hémodynamique le l’artère vertébrale controlatérale sont plus prononcés après la rotation maximale de la tête comparativement à la manipulation cervicale, en particulier pour ce qui est du flux sanguin, ce qui suggère que les changements observés pourraient être dû à la rotation induite lors des manipulations cervicales. De plus, les résultats de l’étude montrent que les manipulations cervicales ne produisent aucun changement de la perfusion sanguine au cerveau comparativement à la position neutre ou à la rotation cervicale maximale.  Indirectement, les résultats de cette étude suggèrent que les manipulations cervicales n’augmenteraient pas le risque d’accident vasculaire cérébral par un quelconque mécanisme hémodynamique.

 

Forces de l’étude:

  • Devis de l’étude : essai randomisé croisé. Ce type de devis a pour avantage d’assurer une forte comparabilité des groupes contrôles et le groupe intervention puisque ce sont les mêmes patients que l’on retrouve dans ces deux groupes. Ce type de devis permet de diminuer grandement la variabilité (chaque patient est son propre témoin). Ce type d’étude permet également d’obtenir une puissance statistique satisfaisante avec un nombre moindre de patients.

 

  • Utilisation de l’IRM pour la quantification du flux sanguin et de la vélocité, cette méthode étant considérée comme le standard de choix en raison de sa grande sensibilité (comparativement à d’autres méthodes telles que l’ultrasonographie)

 

  • Les manipulations cérébrales ont été effectuées par un seul chiropraticien, qui limite la variabilité de la technique.

 

 

Limites de l’étude:

  • Les mesures sont prises après les manœuvres, impossible de déterminer l’effet des manœuvres en temps réel.

 

  • Petit nombre de participants.

 

 

 

Rérérences complémentaires

  1. Côté P, Wong JJ, Sutton D, et al. Management of neck pain and associated disorders: A clinical practice guideline from the Ontario Protocol for Traffic Injury Management (OPTIMa) Collaboration. Eur Spine J 2016;25:2000–22.
  2. Kjaer P, Kongsted A, Hartvigsen J, et al. National clinical guidelines for non-surgical treatment of patients with recent onset neck pain or cervical radiculopathy. Eur Spine J 2017;26:2242–57.
  3. Hurwitz EL, Coulter ID, Adams AH, et al. Use of chiropractic services from 1985 through 1991 in the United States and Canada. Am J Public Health 1998;88:771–6.
  4. Hurwitz EL, Chiang LM. A comparative analysis of chiropractic and general practitioner patients in North America: findings from the joint Canada/United States Survey of Health, 2002-03. BMC Health Serv Res 2006;6:49.
  5. Haldeman S, Carey P, Townsend M, et al. Arterial dissections following cervical manipulation: the chiropractic experience. CMAJ 2001;165:905–6.

6.Albuquerque FC, Hu YC, Dashti SR, et al. Craniocervical arterial dissections as sequelae of chiropractic manipulation: patterns of injury and management. J Neurosurg 2011;115:1197–205.

  1. Ernst E. Manipulation of the cervical spine: a systematic review of case reports of serious adverse events, 1995-2001. Med J Aust 2002;176:376–80.
  2. Norris JW, Beletsky V, Nadareishvili ZG. Sudden neck movement and cervical artery dissection. The Canadian Stroke Consortium. CMAJ 2000;163:38–40.
  3. Cassidy JD, Boyle E, Côté P, et al. Risk of vertebrobasilar stroke and chiropractic care: results of a population-based case-control and case-crossover study. Spine 2008;33(4 Suppl):S176–83.
  4. Boyle E, Côté P, Grier AR, et al. Examining vertebrobasilar artery stroke in two Canadian provinces. Spine 2008;33(4 Suppl):S170–5.

6 : defined as neck pain with no signes or symptoms of major structural pathology, wich may or may not interfere with activities of daily living.

 

[1] Cervicalgie de Grade 1 : Pas de signes ou symptômes de pathologie structurale et pas ou peu de restriction des activités quotidiennes

Cervicalgie de Grade 2 : Pas de signes ou symptômes de pathologie structurale, mais présence de restrictions des activités quotidiennes